La pollinisation du cannabis

La pollinisation est un processus auquel nous accordons peu d'attention, alors qu'elle génère et assure la biodiversité dans le monde entier, et que, sans elle, notre subsistance serait impossible. Lorsqu'il s'agit du cannabis, c'est sans nul doute l'alpha et l'oméga de tout le processus biologique de cette plante. C'est pourquoi il est important de comprendre son fonctionnement afin de tirer le meilleur parti de nos cultures.

Le cannabis est soit une espèce végétale monoïque (les plantes peuvent être des deux sexes, hermaphrodites) soit dioïque (les fleurs mâles et femelles sont portées par des plantes distinctes). Les deux types de plantes de cannabis existent dans la nature, bien que les hermaphrodites ne s'expriment généralement que dans certaines conditions de stress. Par exemple, si une plante de cannabis femelle sent une mort imminente, elle commencera à exprimer des caractéristiques mâles afin de s'autopolliniser.

Le cannabis transmet son ADN de manière sexuée par l'intermédiaire de la pollinisation. Les mâles développent des grappes de fleurs qui libèrent du pollen depuis leurs anthères (la partie où se termine une étamine). Une seule fleur mâle peut produire 350 000 grains de pollen. Ce matériel génétique de taille microscopique est acheminé vers les plantes femelles par le vent (ou par des insectes pollinisateurs, comme les abeilles) et peut parcourir de grandes distances, voire des dizaines de kilomètres, lorsque les conditions sont favorables.

L'objectif de ce pollen est de remplir son mandat génétique, à savoir féconder le plus grand nombre possible de femelles. La pollinisation se produit lorsque le pollen atteint les stigmates de la femelle, ce qui amène les plantes à produire des graines à l'intérieur des pistils, leur organe reproducteur, pour perpétuer l'espèce.

Un cultivateur vérifiant si un plant de cannabis a été pollinisé.
Un cultivateur vérifiant si un plant de cannabis a été pollinisé.

Pourquoi le pollen peut-il être dangereux pour votre culture

Dans les années 1970, les cultivateurs de cannabis ont découvert que le fait d'éviter la pollinisation, en éliminant les plantes mâles ou en produisant uniquement des femelles (par propagation via les boutures ou par semis de graines féminisées), pouvait augmenter considérablement le rendement et la puissance d'une récolte. Cela fonctionne parce que le cannabis est l'une des rares espèces végétales capables d'augmenter activement le nombre et la taille de ses organes sexuels femelles, en réponse à une virginité prolongée: plus les plantes femelles restent longtemps non pollinisées, plus elles produisent de fleurs et plus elles grandissent.

Cette révélation est à l'origine de la pratique moderne consistant à éliminer les mâles et à sélectionner uniquement des femelles pour la culture car, dans une perspective très réelle, la préservation de la virginité féminine du cannabis est précieuse. Les cannabinoïdes, tels que le THC et le CBD, sont concentrés dans les tissus et les trichomes de la fleur femelle. En fait, une étude de 1998 publiée dans le "Journal of the International Hemp Association" (et prise comme référence) avait déjà constaté que la pollinisation diminuait de 56% le rendement des fleurs de cannabis en huiles essentielles.

C'est pourquoi, de nos jours, la plupart des producteurs évitent la pollinisation en éliminant les mâles de leurs cultures afin d'obtenir du cannabis "sans graines". En effet, lorsque les plantes investissent de l'énergie dans la production de graines, elles produisent moins de cannabinoïdes comme le THC ou le CBD, de sorte que les fleurs qui en résultent subissent une diminution de leur valeur médicinale ou récréative. De plus, fumer du cannabis contenant des graines est, il ne faut pas le cacher, plutôt désagréable.

Qu’est-ce que l'autopollinisation?

L'autopollinisation désigne une fleur qui a la capacité de se polliniser elle-même et de polliniser d'autres fleurs produites par la même plante. Elle n'a pas besoin du pollen d'une autre plante pour être féconde. Les espèces hermaphrodites et monoïques, qui constituent une grande partie des espèces végétales, ont le potentiel de s'autopolliniser.

Plante de cannabis hermaphrodite, avec des fleurs mâles et femelles sur la même plante
Plante de cannabis hermaphrodite, avec des fleurs mâles et femelles sur la même plante

Une plante autopollinisante possède des parties reproductives mâles et femelles. Le pollen s'accumule dans les anthères mâles de la plante, puis est transféré vers le stigmate femelle de la fleur pour achever le processus de fécondation.

Certaines plantes autopollinisantes peuvent même se polliniser avant de fleurir, en fonction de la croissance naturelle du bouton floral. Lorsque le stigmate de la fleur se développe à travers les anthères et que la fleur commence à s'épanouir, il transfère efficacement le pollen entre les parties mâles et femelles de la fleur.

Les risques de la pollinisation croisée

L'opposé de l'autopollinisation est la pollinisation croisée, qui se produit lorsqu'une variété de plante pollinise une autre variété, soit intentionnellement par intervention humaine, soit naturellement. Rappelez-vous, c'est important, que seules les plantes de même espèce ou d'espèces étroitement apparentées peuvent se polliniser mutuellement. Bien que les cultures de cannabis et de chanvre soient généralement utilisées à des fins très différentes, elles sont étroitement liées et peuvent se polliniser mutuellement.

Le cannabis et le chanvre sont des variétés différentes de la même espèce (Cannabis sativa), mais la façon dont ces plantes se reproduisent peut entraîner des différences majeures dans le type, la puissance et les quantités de substances chimiques qu'elles génèrent.

Par exemple, lorsque le chanvre et le cannabis se pollinisent, la qualité de chacun diminue: la puissance des cannabinoïdes dans les plants femelles de cannabis est réduite, tandis que le THC dans les plants de chanvre peut augmenter. C'est la recette d'un désastre. En effet, la pollinisation croisée peut ruiner les cultures commerciales et provoquer des dommages financiers incalculables.

Aux États-Unis, à mesure que l'industrie se développe, les cultivateurs en extérieur sont confrontés à une perte potentielle de milliers de dollars si les plantes ne peuvent être commercialisées en raison de la pollinisation croisée.
Aux États-Unis, à mesure que l'industrie se développe, les cultivateurs en extérieur sont confrontés à une perte potentielle de milliers de dollars si les plantes ne peuvent être commercialisées en raison de la pollinisation croisée.

Comment éviter la pollinisation?

Aujourd'hui, la plupart des graines du marché sont féminisées, car les cultivateurs préfèrent s'assurer d'une descendance 100% (disons 99%) femelle pour produire des fleurs de cannabis sans graines, c'est-à-dire des fleurs au sommet de leur teneur en cannabinoïdes et en terpènes.

Mais avant que ces graines n'apparaissent sur le marché, les anciens cultivateurs de cannabis utilisaient des graines régulières, lesquelles produisent des phénotypes de cannabis mâles et femelles. Les producteurs d'antan devaient donc être très vigilants pour détecter les pieds mâles et les éliminer de leur culture.

Comment déterminer si une plante est mâle ou femelle?

Les plantes de cannabis ne montrent pas leur sexe pendant la phase végétative, mais au début de la floraison. Cette phase, appelée "pré-floraison", commence dans la nature lorsque les conditions la lumière diminue et que les jours raccourcissent.

La croissance du Cannabis (Phase vegetative)

La phase de croissance ou végétative fait partie intégrante du développement de la plante de marijuana. Dans cet article, nous passons en revue les aspects fondamentaux de cette phase importante, tels que les paramètres de lumière, la nutrition ou l’arrosage, aussi bien en culture d’intérieur que d’extérieur.

Et c'est ici que le cultivateur doit être très attentif. La partie à examiner est ce que certains appellent communément l'"aisselle", c’est-à-dire la jonction entre la tige principale et les branches. Juste là, en bas, vous pouvez voir ce qu'on appelle des primordia de fleurs, ou bourgeons:

  • Dans le cas des plantes femelles, ils se présentent comme une petite poche arrondie en forme de poire d'où émergent deux stigmates blancs (la partie du pistil qui reçoit le pollen), que de nombreux cultivateurs appellent communément "poils".
  • Les plantes mâles, quant à elles, formeront également une poche mais sans stigmate. Vous pouvez même voir que la fleur est composée de cinq sépales, qui forment le calice et s'ouvriront pour révéler les étamines contenant le pollen.

La clé pour savoir si une plante de cannabis est mâle ou femelle est d'observer si ces stigmates (poils) apparaissent ou non. Plus tard, pendant la phase de floraison, les fleurs mâles s'ouvrent, révélant à l'intérieur une structure qui ressemble à une petite grappe de bananes. Ce sont les étamines qui finiront par répandre leur pollen pour féconder les fleurs femelles.

Les plantes de cannabis femelles, quant à elles, après avoir signalé leur sexe féminin avec les premiers stigmates, vont générer des grappes de fleurs avec davantage de "poils", qui commenceront à se couvrir de glandes de résine (trichomes) pour finalement s'accumuler sous forme de fleurs.

Aspect des fleurs de cannabis mâles tandis qu'elles commencent à s'ouvrir pour libérer leur pollen.
Aspect des fleurs de cannabis mâles tandis qu'elles commencent à s'ouvrir pour libérer leur pollen.

La pollinisation du cannabis pour produire des graines

Mais au-delà de l'identification des mâles et de leur élimination pour obtenir des fleurs sans graines, à mesure que les utilisateurs de cannabis progressent et deviennent plus expérimentés sur le sujet, ils prennent finalement la décision de produire leurs propres graines au lieu de partir de zéro. C'est le meilleur moyen de préserver (voire de renforcer) des génétiques dont les caractéristiques méritent d'être perpétuées ; ou de pratiquer l'hybridation entre deux souches dont on souhaite croiser les propriétés.

À titre de référence, entre le moment où le mâle commence à fleurir et celui où il ouvre ses premières fleurs pour libérer le pollen, il s'écoule entre deux et trois semaines. Bien qu'en 10 jours seulement, vous commencerez déjà à voir ces petits "sacs" floraux (qui ne sont rien d'autre que des fleurs mâles) et les premiers stigmates de la plante femelle.

Lorsque la plante mâle est mature, les fleurs ouvrent leurs sépales, exposant ainsi les étamines et libérant le pollen dans l'air. C'est le moment où il faut procéder à la pollinisation, car si on attend plusieurs jours, le pollen peut perdre considérablement sa fertilité. De plus, avec une humidité supérieure à 75%, le pollen commence à mourir rapidement, il est donc préférable de le maintenir aussi déshydraté que possible.

Les femelles sont prêtes à être pollinisées après leur période de floraison précoce et lorsque de grosses grappes de fleurs se sont développées. Le meilleur moment pour polliniser la femelle, c'est lorsque les fleurs ont les stigmates (les "poils" blancs) les plus longs et les plus blancs, soit généralement quatre à cinq semaines après le début de la floraison, selon la variété. Il existe même des variétés qui peuvent être pollinisées à partir du 20ème jour de floraison.

Mais n'oubliez pas que les temps de floraison des mâles et des femelles sont différents, puisque les mâles entrent en phase de floraison plus tôt que les femelles: généralement, les plantes mâles ont tendance à arriver à maturité environ 2 semaines plus tôt que les femelles. C'est avec cet écart temporel que vous devez travailler, car plus le mâle a de pollen, plus il est fertile et plus la femelle est susceptible de polliniser.

Un plant de cannabis femelle prêt à être pollinisée
Un plant de cannabis femelle prêt à être pollinisée

Application du pollen pour la pollinisation

L'application du pollen est très simple: si vous avez coupé les fleurs et conservé le pollen, répandez-le sur la plante féminisée avec un pinceau ou même vos doigts. Répétez cette opération pendant deux ou trois jours.

Cependant, il n'y a rien de mieux que le pollen frais prélevé directement sur les fleurs mâles. Une autre méthode de pollinisation consiste donc à prendre directement la plante mâle et à la secouer au-dessus des femelles, afin que leur pollen tombe sur les fleurs.

Il est important d'allumer les ventilateurs avant de secouer la plante, afin que le pollen se déplace partout. La température de la pièce où a lieu la pollinisation doit être de 24 °C avec une humidité ne dépassant pas 65%. Plus l'humidité est faible, plus les gouttelettes de pollen restent longtemps en suspension dans l'air, au lieu de tomber directement sur le sol.

Comment savoir si une plante a été pollinisée?

Le pollen, une fois qu'il a touché les stigmates de la plante femelle, met encore 3 à 5 jours à atteindre l'ovaire pour que la fécondation se produise. Vous pouvez savoir si une plante femelle a été pollinisée en observant les stigmates, qui changent de couleur pendant la floraison, passant du blanc à l'orange foncé ou au rouge. Sur les fleurs qui n'ont pas été pollinisées, l'ensemble du stigmate change de couleur. Cependant, après exposition au pollen, seules les pointes des stigmates foncent, tandis que les autres parties restent blanches.

Les graines de cannabis prennent généralement environ 6 semaines pour se développer pleinement (selon la variété). À la fin de la floraison, elles seront prêtes à être récoltées – au moment où les graines commencent à passer du vert au brun ou au gris foncé, et où les calices commencent à s'ouvrir pour qu'elles puissent sortir facilement.

Certaines plantes meurent littéralement au moment où les graines sont prêtes à être récoltées. Ainsi, essayez de maintenir votre plante en vie jusqu'à ce que les graines commencent à tomber. Les graines peuvent être utilisées immédiatement ou conservées dans un endroit frais, sec et sombre. Stocker les graines de cannabis dans de bonnes conditions vous permet de conserver longtemps vos génétiques préférées, alors n'oubliez pas de les étiqueter avec la date!

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Références:

  • Expansion of female sex organs in response to prolonged virginity in Cannabis sativa (marijuana). Ernest Small & Steve G. U. Naraine.
  • Factors influencing the yield and the quality of hemp (Cannabis sativa L.) essential oil. Christoph Meier & Vito Mediavilla.
27-06-2022 Manuel de culture

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